Le comparer à Agdazou à Tazmamart est une énormité. Manifester devant ce siège contre des violations de droits de l’homme quand on en est convaincu est normal. Les gens du 20 février, certains d’entre eux ont tenté de le faire, la police les a dispersés.

L’événement n’est pourtant pas dans ce clash. L’événement c’est que cette manifestation était sous l’emprise de la Salafya Jihadia. Les forces de sécurité ont empêché à Tanger un groupe de militants de cette mouvance d’une cinquantaine de personnes de prendre la route pour Rabat. La police a saisi des armes blanches et des drapeaux d’Al Qaïda. Quelques heures après la manifestation, les détenus de la Salafya lançaient une mutinerie à la prison de Salé.

Partout au Maroc, dans les cortèges du 20 février, la Salafya est bruyamment représentée. Les jeunes veulent continuer dans l’illusion d’un mouvement auto-contrôlé ouvert à tous. Où ils sont naïfs où ils sont de mauvaise foi. Même Annahj a perdu pied, c’est Al Adl qui mène la danse et maintenant la Salafya s’engage.

Au Hay Mohammadi les populations ont rejoint en masse le cortège de quelques centaines de manifestants, avec des revendications d’ordre strictement social. Les Adlistes ont appelé des renforts avec la logistique qu’il faut, une demi-heure plus tard la manifestation de dix mille personnes, leur appartenait. « Le peuple veut le départ du régime » entendait-on de loin. Ce sont ceux qui ont les porte-voix les plus puissants qui font l’image. Les jeunes vont bien sûr protester lors de simulacres d’Assemblée Générale d’un mouvement forcément hétéroclite. Cela n’empêchera pas les intégristes de recommencer.

En fait, ils sont les seuls à être conséquents depuis le départ. Ils ont patiemment noyauté le mouvement se refusant à toute apparence massive, pour éviter un face-à-face avec le pouvoir. Ils ont ensuite étendu leur toile et élevé à chaque fois le plafond des revendications, sachant qu’au final ce qu’ils recherchent c’est l’affrontement, mais entre « le peuple » et non pas Al Adl et le pouvoir. Maintenant le temps presse. La contestation sociale prend de l’ampleur et il faut faire la jonction avec elle. Ensuite la commission sur la réforme constitutionnelle va rendre sa copie et les processus référendaire et ensuite électoral seront lancés, changeant l’environnement. Ils veulent le clash, le raidissement le plus tôt possible, pour enfin retrouver le schéma Iranien. Ils ont maintenant un allié, encombrant mais qui peut servir la Salafya.

Les gauchistes et les jeunes du 20 février, en suivant ce mouvement ne sont que des compenses. Ils doivent impérativement se dissocier des intégristes s’ils veulent rester dans le cadre de la lutte pacifique pour la démocratie. C’est quand même drôle de voir côte à côte une militante de Mali et un barbu de la Salafya au nom de la liberté, alors qu’il réclame sa mort !